Vers une véritable réforme de notre modèle social ? 

Adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 19 juin 2018, le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel est désormais examiné par le Sénat. La loi devrait être adoptée pendant l’été.

Ce projet de loi entend poursuivre la rénovation du modèle social en axant les réformes sur la formation, l’apprentissage et l’assurance chômage tout en veillant notamment à améliorer l’emploi des travailleurs handicapés et l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel s’articule principalement autour des quatre volets suivants :
  • la formation professionnelle continue ;
  • le système d’apprentissage ;
  • l’assurance chômage ;
  • la politique d’insertion professionnelle des travailleurs handicapés.

Il traite également de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et propose des sanctions plus dissuasives dans la lutte contre la fraude au détachement.

La réforme du système de formation professionnelle continue
 
Les principales mesures proposées en matière de formation professionnelle continue sont notamment les suivantes :
  • l’alimentation de compte personnel de formation (CPF) s’effectuerait en euros et non plus en heures. A ce titre, les articles du code du travail relatifs au compte professionnel de prévention (pénibilité) seraient modifiés : les points acquis au titre de ce compte seraient ainsi convertis en euros et non plus en heures de formation, de même pour le compte engagement ;
  • les formations longues pour se reconvertir, pouvant jusqu’ici donner lieu à un congé individuel de formation (CIF), s’effectueraient désormais via le compte personnel de formation de transition professionnelle ;
  • la taxe d’apprentissage et la cotisation formation professionnelle seraient réunies en une nouvelle contribution unique relative à la formation professionnelle et à l’apprentissage ;
  • le crédit du compte personnel de formation sera majoré pour les salariés handicapés ;
  • un système de formation « Pro A » en alternance serait créé pour les salariés visant à favoriser la reconversion et la promotion interne ;
  • le plan de formation serait simplifié et deviendrait le plan de développement des compétences ;
  • la collecte des cotisations relatives à la formation professionnelle et à l’apprentissage serait désormais assurée par l’Urssaf et non plus par les organismes paritaires collecteurs agréés, qui seraient renommés les opérateurs de compétences.

La transformation du système d’apprentissage
 
En matière d’apprentissage, le projet de loi prévoit notamment les points de réforme suivants :
  • l’apprentissage serait ouvert aux jeunes jusqu’à 30 ans, au lieu de 26 ans aujourd’hui ;
  • Sous réserve de dérogations, le temps de travail maximum des jeunes travailleurs et apprentis mineurs serait porté de 35 à 40 heures par semaine ;
  • la procédure d’enregistrement du contrat d’apprentissage serait supprimée au profit d’un dépôt ;
  • une aide unique aux employeurs d’apprentis serait instaurée pour les entreprises de moins de 250 salariés employant un apprenti, afin de préparer un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus au baccalauréat. Elle remplacerait trois dispositifs d’aides gérés par l’État ou les régions, ainsi qu’un crédit d’impôt.

La réforme de l’Assurance chômage
 
Les deux mesures suivantes seraient notamment prises en matière d’Assurance chômage :
  • afin de garantir une assurance chômage plus universelle et plus juste, l’indemnisation des démissionnaires et des indépendants ayant un projet professionnel de reconversion ou de création serait prévue sous conditions ;
  • la contribution patronale d’assurance chômage de chaque entreprise pourrait être minorée ou majorée en fonction du nombre de fin de contrats de travail (hormis les démissions) donnant lieu à inscription sur la liste des demandeurs d’emploi ou en fonction de son secteur d’activité

Le renforcement de l’égalité professionnelle et de l’insertion des travailleurs handicapés
 
Les transformations proposées dans ces deux domaines sont notamment les suivantes :
  • en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, le projet de loi propose l’obligation pour l’employeur d’afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et les coordonnées des services compétents ;
  • un principe général d’obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés de mesurer, grâce notamment à un indicateur chiffré et anonymisé, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes serait instauré ;
  • concernant l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, celle-ci serait maintenue pour les employeurs avec un taux de 6 %, révisable tous les 5 ans ;
  • la procédure de déclaration des travailleurs handicapés serait quant à elle simplifiée et effectuée via la déclaration sociale nominative (DSN).

Le renforcement de la lutte contre les fraudes en matière de détachement des travailleurs
 
Le projet de loi contient un volet dédié à la lutte contre les fraudes en matière de détachement avec notamment les propositions suivantes :
  • des sanctions plus dissuasives seraient instaurées en matière de fraude au détachement de travailleurs, notamment le montant maximal de l’amende administrative passerait de 2 000 à 3 000 euros par salarié détaché, porté à 6 000 euros au lieu de 4 000 euros en cas de réitération ;
  • un nouveau cas de suspension de prestation, pour une durée de 2 mois renouvelable, serait appliqué à l’égard d’un prestataire étranger dans le cas où il ne se serait pas acquitté du paiement des amendes administratives déjà notifiées par la DIRECCTE ;
  • un nouveau cas d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’activité propre au détachement serait créé ;
  • serait prévue une peine complémentaire de diffusion automatique, sur un site internet dédié, des condamnations en matière de travail dissimulé en bande organisée.
Toutefois, des allègements de charges seraient en contrepartie accordés :
  • la contribution forfaitaire devant être versée par l’employeur avant tout détachement de salarié en France serait abrogée ;
  • un allègement des conditions administratives serait prévu pour faciliter la mise en œuvre du détachement dans le cadre de situations particulières : activités en zone frontalière, prestations de courte durée, détachement pour compte propre.


Autres mesures sociales

A titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2021, le projet de loi prévoit la possibilité de remplacer plusieurs salariés absents dans le cadre d’un même contrat à durée déterminée (CDD).

En outre, les titulaires de contrats uniques d’insertion seraient pris en compte dans le calcul des effectifs applicables en matière d’institutions représentatives du personnel, afin de mettre en conformité la législation française avec la jurisprudence communautaire tout en confortant la logique d’inclusion des salariés en parcours d’insertion.

Enfin, le projet de loi entendrait ratifier sans modification une ordonnance relative au droit du travail à Mayotte.

Pour aller plus loin :

– 5 juillet 2018 –

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